« C’est un abus de l’histoire », déclare l’historien Bruno De Wever à propos de l’utilisation de l’étoile de David par l’ambassadeur israélien

Revenons un instant au Conseil de sécurité de l’ONU de lundi. L’ambassadeur israélien Gilad Erdan a annoncé que lui et son équipe porteraient une étoile de David jaune jusqu’à ce que le Conseil de sécurité condamne la violente attaque du Hamas le 7 octobre. « Certains d’entre vous ont oublié pourquoi ce corps a été créé », a déclaré Erdan. Les Nations Unies ont été créées après la Seconde Guerre mondiale, un conflit au cours duquel tous les Juifs sous le régime nazi étaient obligés de porter une étoile de David jaune afin que chacun puisse voir qu’ils étaient juifs. L’ambassadeur Erdan relie ainsi l’Holocauste aux atrocités du Hamas. Le Hamas, qui dirige Gaza, figure sur la liste terroriste des organisations interdites par l’UE.

L’ambassadeur israélien a été critiqué pour sa déclaration. Le centre mémorial de l’Holocauste à Jérusalem l’a même qualifié de irrespectueux envers les victimes. En Flandre aussi, il y a des critiques. « C’est un abus de l’histoire », a déclaré à la VRT l’historien flamand Bruno De Wever. « L’Holocauste est le symbole de la victimisation ultime et cela est maintenant délibérément utilisé par une partie dans un conflit armé. Israël essaie ici d’utiliser une analogie historique, mais ce n’est pas une utilisation correcte de l’histoire. »

Au moins 1 400 Israéliens ont été tués lors de l’attaque sanglante du Hamas le 7 octobre, mais selon Bruno De Wever, on ne peut pas simplement comparer cela à ce qui s’est passé pendant la Seconde Guerre mondiale. « C’est horrible ce qu’a fait le Hamas, mais on ne peut pas simplement lier cela au génocide commis contre le peuple juif pendant la guerre. Ce n’est pas historiquement correct. »

De Wever est également mécontent du fait que le terme « génocide » soit utilisé si librement pendant ce conflit. « Israël est accusé d’avoir commis un génocide contre les Palestiniens à Gaza. Cela aussi est inexact, car l’armée israélienne n’a pas l’intention d’exterminer les habitants de Gaza, alors que c’est la définition historique d’un génocide. »

Parallèlement au conflit armé, Bruno De Wever voit également comment une guerre symbolique des mots a surgi en même temps. « Dans ce contexte, Israël tente d’utiliser l’extermination des Juifs comme une sorte de contre-argument au génocide dont ils sont eux-mêmes (à tort) accusés. Ils tentent d’utiliser l’histoire pour créer une image différente d’eux-mêmes. »

Israël n’est pas seul

Les Israéliens ne sont pas les seuls à vouloir abuser de l’histoire, estime De Wever. «C’est quelque chose qui arrive souvent lors de conflits ou de guerres», dit-il. « On le voit aussi en Russie. Poutine légitime sa tentative d’annexion de l’Ukraine avec des arguments historiques. Il traite les Ukrainiens de fascistes. Il abuse du fait qu’un petit nombre d’Ukrainiens ont collaboré pendant la Seconde Guerre mondiale pour légitimer la guerre qu’il mène lui-même en Ukraine. « .

Dans notre région du monde aussi, les gens ont osé abuser de l’histoire avant que De Wever n’y croit. Certains se contentent de comparer le climat politique actuel et la montée des partis d’extrême droite à la situation des années 1930, lorsque le nazisme était en plein essor. « C’est aussi une comparaison typique », déclare De Wever. « Alors que les différences avec les années 1930 sont plus grandes que les similitudes. »

« En fait, nous sommes trop heureux d’utiliser l’histoire comme un grand sac à main, dans lequel nous pouvons prendre ce qui nous convient pour faire valoir notre point de vue », conclut De Wever.