Baisse des prix alimentaires pour tous ou bons alimentaires pour les nécessiteux ?

Avec l’élection à l’horizon, les partis politiques ont hâte de se distinguer. Les prix alimentaires restent à de nouveaux sommets historiques. L’homme politique socialiste espère plaire à son électorat par une intervention musclée. Le commentateur politique de la VRT, Fabian Lefever, note que les socialistes francophones sont fouettés par la concurrence de la gauche du Parti travailliste.

Un projet de loi soutenu par les socialistes flamands et francophones et le Parti travailliste d’extrême gauche a été rejeté en commission au parlement. Le projet de loi permettait au gouvernement d’imposer des prix ou des marges maximaux au moment où les prix montaient anormalement. L’observatoire des prix qui surveille l’évolution des prix en Belgique serait également renforcé.

Pas de majorité politique

L’inflation alimentaire s’élève actuellement à plus de 16 %. Un gel des prix a été introduit en France, mais il n’y a pas de majorité politique pour ce genre d’action ici. Les partis de droite et centristes pensent qu’il s’agit d’une mesure qui fausse le marché. Le risque est que des produits disparaissent des rayons si les prix sont limités.

Pour être clair, il existe déjà en Belgique une procédure permettant d’agir si les marges des producteurs deviennent excessives. Dans de tels cas, l’observatoire des prix peut alerter l’autorité de la concurrence, qui peut alors geler les prix. Seulement, cela ne s’est jamais produit, en partie à cause de la procédure exigeante impliquée.

Enquête sur les marges de prix

Ne parvenant pas à rallier le Parlement, Dermagne a maintenant décidé de changer de cap. Après avoir rencontré la Fevia, la fédération de l’industrie alimentaire, mercredi soir, il a commencé à utiliser un langage menaçant. Si les prix ne baissent pas d’ici la mi-juillet, Dermagne nommera et fera honte à tous ceux qui ne veulent pas baisser les prix.

Le ministre estime que, alors que les prix des matières premières chutent, un certain nombre d’entreprises se cachent derrière l’inflation pour empêcher les prix en magasin de suivre le mouvement. Fevia s’en défend : selon la fédération, les marges n’augmentent pas. Dermagne a déjà commandé une enquête à l’observatoire des prix pour scruter les marges.

La question demeure : quelle est la meilleure approche ? Blocage des prix ou alternative ? Selon le professeur Xavier Gellynck, économiste agricole et alimentaire à l’Université de Gand, l’intervention de l’État n’est pas une bonne idée.

« Le marché des produits alimentaires est un exemple classique de concurrence ; la fixation des prix n’est pas un problème. Notre marché fonctionne parfaitement et l’intervention de l’État n’est pas souhaitable. Vous ne pouvez pas parler de marges bénéficiaires élevées », déclare Gellynck. Selon l’universitaire, les recherches commanditées par le ministre Dermagne le démontreront.

L’économiste reconnaît que les prix sont élevés et le resteront. Il pense que l’intervention est permise et même nécessaire, mais l’approche devrait être différente. Il cite en exemple les chèques énergie et prône un soutien ciblé pour ceux qui sont en difficulté. Il s’agit alors d’une mesure payée par le contribuable et non par le secteur alimentaire lui-même.

Gellynck: « Des problèmes sociaux peuvent survenir parce que certaines personnes ne peuvent pas faire face à des prix alimentaires plus élevés. Mais des mesures pour ce groupe spécifique ont plus de sens qu’une mesure qui profite à tout le monde. »